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๑۩۞۩๑ Oº°‘¨ Amel ¨‘°ºO ๑۩۞۩๑
30 novembre 2006

... Moi j'oublie rien ...

Septembre 94

  J'arrive dans cette nouvelle école. Encore une. J'en ai assez d'être ballotée à droite à gauche, mais je ne peux pas de toutes façons faire autrement, les Soeurs de Jeanne d'Arc ne voulaient plus de moi!Alors me voilà propulsée à nouveau dans un univers inconnu, avec des profs inconnus et des adolescents inconnus. Je suis là, en ce jour de rentrée scolaire, à regarder à la fois effrayée et ravie les 'autres' qui allaient forger mon univers de cette année là. Je les trouve tous bizarres, tous trop rapides, ils ont tous leurs marques. Pas moi.

  Je file dans un couloir, derrière une porte, la tactique de la fuite classique, j'ai passé un temps infini derrière les portes chez les soeurs, je savais qu'on pouvait me chercher derrière cette porte énorme, après le couloir qui menait au lycée, mais qu'on ne m'y trouverait jamais. J'étais bien, personne ne me voyait, je ne voyais personne. Première approche du collège près de chez mon père: une porte et moi derrière. 'Eh, c'est toi Amélie?' 'Euh... Oui!...' Ma grand mère m'a prévenue que tu venais aussi cette année, j'habite à côté de chez toi, on est client de la boutique. On fait la route ensemble ce soir?' Rien. Blanc. Silence. Mes yeux plein de vide. 'Oui!...' Et sourire. J'ai dit oui, mais je ne savais même pas ce qu'était la question.

  Fanny, j'allais le découvrir dans les heures qui suivaient, vivait un peu la même situation que moi, vivait chez son père autrement dit. Elle et moi, pendant longtemps, mais je ne le savais pas encore, on allait passer des heures à parler fringues, mecs, bonbons, cours, et chansons. Et Max qu'on écoutait et plein de sujets plus ou moins légers, ce qui faisait que j'avais le sentiment d'avoir une vraie amie. Fanny allait devenir par la suite une connaissance, pour tomber dans ce qu'on peut qualifier d'oubli. De sa part et de la mienne. Elle a suivi un cursus de coiffure que j'avais du mal à comprendre et elle ne comprenait pas le mien en littérature. On est allé main dans la main presque pour voir les résultats du brevet des collèges... Toutes les deux à la fois déçue et ravie: l'une l'avait et l'autre non. Nous n'étions pas dans la même classe, mais nous partagions quelques centaines de mètres carrés en commun. Fanny, c'était de l'insouscience à l'état brut, des bonbons dans un sachet. Fanny, c'était une copine de collège.

  'Je peux me mettre à côté de toi?' La petite brunette qui vient s'asseoir à côté de moi en effet tandis que je disais un 'Oui...' inquiet et peu engageant avait l'air parfaitement à l'aise. Ses cheveux étaient d'un noir profond et brillant, elle avait des ongles superbes et elle avait une écriture toute ronde qui me donnait envie d'avoir la même. Et ses cheveux ondulaient en plus. La vie est injuste, je me disais. Moi, j'étais toujours d'un blond fadasse et filasse, mes yeux kakis ne semblaient troubler que mon propre reflet et encore, de dégoût! quand je me croisais le matin dans la salle de bain. Mes ongles n'existaient tout bonnement pas, puisque je prenais un malin plaisir à ronger tout ce qui dépassait. La brunette avait une peau mordorée, moi j'étais pâle comme une seiche... Elle avait des yeux qu'on aurait pu croire maquillés, j'ai toujours eu des cils quasi inexistants. Et à un âge où l'apparence compte... Je me disais très souvent que la vie était vraiment bizarrement faite. La brunette n'est restée dans mon esprit 'la Brunette' que durant quatre secondes, le temps qu'elle me dise 'Moi, c'est Lucile! Et toi? Tu es nouvelle?'

  On m'adressait la parole! Alors, reflexion, attention à ne pas dire de phrase de travers, parce que je suis la reine des gaffes, et je prends un air superbement niais quand je suis mal à l'aise... Le temps de penser ça et son contraire, je disais avec mon air niais 'J'm'appelle Amélie, et j'suis nouvelle...' La conversation s'engageait, je me disais que j'avais pas fait si mal, j'aurai pu l'envoyer bouler, mais non.

  En fait, je ne sais pas encore ce jour là, mais Lucile est quelqu'un. Vous savez, le genre de personne qu'on ne peut pas oublier? Et bien voilà, c'est Lucile. Curieuse, souriante, avenante. Elle a en plus quelque chose qui m'interpelle chez elle. C'est son accent. Beaucoup me diront 'Mais non! Les Lyonnais n'ont pas d'accent!' Et bien si figurez vous. Et pour moi, cet accent, c'était le p'tit truc en plus de Lucile et ses caractéristiques méditerranéennes. Un caractère bien trempé, sous des couverts de calme... Un Tempérament, que dis-je, une verve à toute épreuve parfois!

  On s'est engueulé, on s'est chamaillé, on s'est même detesté. On s'est retrouvé, on s'est adoré, on s'est rapproché. On s'est tout dit. On a refait le monde. On est sorti en boîte, sorti au restau, sorti tout court. On a partagé tellement et tellement de choses... Mais ce jour là, dans cette classe, je ne le savais pas encore. J'arrivais en quatrième D au collège, pour redoubler. Je ne savais pas encore que Lucile allait m'aider à beaucoup de chose. Que Lucile allait compter pour moi autant qu'une soeur une époque où je n'avais pas ma soeur aussi souvent que je l'aurai souhaité. Lucile, elle sentait bon la lessive, l'unité familiale que je lui ai longtemps envié, et Lucile était toujours mon coach.  Mon amie.

Août 99

  Un jour, loin de cette première fois où je la rencontrais, Lucile m'annonce: 'Je vais partir. Je vais déménager, je l'ai encore dit à personne, on repart vivre à Lyon.'

  J'ai pleuré longtemps, j'ai pleuré beaucoup. J'avais pourtant pas loin de 19 printemps, mais la douleur était aussi fulgurante que de sentir partir un proche pas définitivement mais presque. Lyon, c'était le bout du monde pour moi. Je venais d'avoir mon Bac. Je me voyais partir en fac avec elle. Et non seulement Lucile partait loin, mais elle partait pour toujours. Elle devait en plus s'en aller en Angleterre... Mais la vie, est ainsi, faite de séparations et de retrouvailles

  Lucile partit donc. Puis reveint quelques jours. Puis repartit. J'attendais mon premier bébé... Qu'elle vit par la suite un peu plus grand... Puis mon second fils... Qu'elle vit plus grand... Puis elle m'annonça son Mariage... Auquel je devais venir... Mais auquel je n'ai pas assisté. Mois d'Août de ses 25 ans. Et moi, je n'étais même pas là.

Août 2006

  Lucile s'est mariée en rouge. Couleur de tous les charmes, elle était superbe sur ses photos. Lucile a encore su allier perséverance et perfection. Lucile incarne tellement de choses à mes yeux!

  Je ne me voyais pas lui raconter pourquoi je ne suis pas venue ce mois là. Pourquoi je me suis finalement séparée de Mika. Pourquoi maintenant je suis seule avec mes enfants. Pourquoi je trime mes 39h par semaine en pensant à combien va me coûter le nourrice. Parce que Lucile n'a pas à être atteinte alors qu'elle vit la plus belle période de sa vie, je  ne lui ai rien dit.

  Alors aujourd'hui, je lui ai promis: je viens sur Lyon, début février. C'est promis. Je lui ai dit que non, je ne l'oubliais pas, oh que non. En fait, je respectais trop son bonheur.

  'Et alors! c'est pas une raison! les amis c'est aussi fait pour aider quand c'est la merde sinon, c'est pas des vrai namis!'

  Oui.

  'Ou alors tu m'as oublié et tu ne me considères plus que comme la nana qu'on voit à l'occasion?'

  Jamais, oh que non. Alors parce que j'ai pas été là pour toi quand tu le voulais, parceque j'ai fait de ma vie ce qu'elle est devenue sans même en parler à cause d'une pudeur mal placée...

  Lu, tu vois, je me souviens. Alors, excuse-moi.

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Commentaires
J
comme j'aimerais pouvoir écrire quelques uns des miens de façon aussi simple et aussi émouvante...
P
Coucou Amelie<br /> je viens d'apprendre ta séparation d'avec Mika.<br /> Pour l'avoir vécu,je sais que c'est difficil,Se refaire une vie a 3 et devoir tout assumer n'est jamais facile.<br /> En tout cas,si tu viens dans le sud,ma porte te reste ouverte,n'hesite pas.En general,je suis pratiquement toujours en vacances en meme temps que les gamins.<br /> Bisous et bon courage a toi
๑۩۞۩๑ Oº°‘¨ Amel ¨‘°ºO ๑۩۞۩๑
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